Honorin Hamard et Meryl Delferriere réalisent un doublé !
La France gagne encore ! C’est un peu devenu une habitude ; depuis 2018, les vainqueurs de la finale de la Coupe du Monde sont exclusivement français :
- Pierre Rémy et Meryl Delferriere en 2018 au Brésil – Baixo Guandu ;
- Luc Armant et Seiko Fukuoka Naville en 2021 en Suisse – Disentis ;
- Honorin Hamard et Constance Mettetal en 2022 au Mexique – Valle de Bravo ;
- Honorin Hamard et Meryl Delferriere en 2023 au Brésil – Baixo Guandu
À force, je ne suis plus très sûr de la meilleure stratégie à adopter pour expliquer à quel point le parapente de haut niveau ce n’est ni facile, ni évident, ni couru d’avance. Nous revenons cette fois encore avec cinq pilotes français dans les six premiers du classement général et quatre médailles individuelles. Magie française ! Profitons donc pendant que cela dure… Voici les faits marquants de ce grand événement international.
Un climat pas évident
Depuis une décennie, Baixo Guandu est devenu un classique des destinations de Coupe du Monde et de cross / voyage itinérant au Brésil. Quelques membres de l’équipe y avaient déjà voyagé à trois reprises ou plus pour participer à des compétitions et cette année nous y avons même rencontré une paire d’écoles françaises en stage cross itinérant. Nous connaissions donc bien ce site très scénique entre pitons rocheux vertigineux, végétation tropicale dense, cascades paradisiaques, larges rios boueux et villes aux sonorités festives et fortes.
Nous savions à quel point l’endroit pouvait être difficile et marginal à certains moments et au contraire excellent à voler puis soudainement très rapide, ceci au cours d’une même journée.
En fait, nous en avions presque oublié que nous ne disposions d’aucune donnée météo pour le mois de mars… et cette fois-ci la treizième Superfinale de la Coupe du Monde de parapente s’est déroulée sous une chaleur quasiment insoutenable. Des surdéveloppements orageux puissants et de fortes pluies tropicales ont émaillé la dizaine de jours dédiés à la compétition. Tandis qu’à l’inverse, les journées ensoleillées envoyaient invariablement une paire de participants dans leur lit d’hôtel avec un bon coup de chaud ou dans un lit d’hôpital avec une déshydratation plus sévère. Climat pas évident !
Et la compétition alors ?
L’un dans l’autre, nous avons quand même couru six manches. Toutefois, entre le vent majoritairement arrière au décollage, l’absence de parcours officiel en direction des merveilleux paysages et reliefs de Pancas, des statistiques météo habituellement plus favorables et quelques passages en vol vraiment marginaux et techniques, les pilotes ne garderont pas tous un souvenir impérissable de cette édition.
Ce qui restera sans doute, ce sont les quelques moments de course sous les nuages dans des paysages absolument magiques du Brésil. Ce sont aussi, les régimes de vol énervés sur les grands parcours en triangle et les multiples traversées du Rio Doce et du grand cratère autour de Baixo Guandu. C’est la cinquième manche épique de 94 km remportée par Honorin où seuls 17 pilotes parviennent à franchir la ligne de but dans la plus pure agonie des dernières lueurs du jour. C’est le trou massif et groupé de 35 voiles lors de la manche du lendemain au beau milieu d’une jungle rare. C’est le résultat et le classement de cette année de Coupe du Monde. C’est enfin et surtout les nombreuses aventures humaines vécues à cette occasion.
Chez les féminines
Chez les féminines, Meryl Delferrière a encore dominé tout au long avec la manière, sixième du général et meilleure performance féminine sur une Superfinale. C’est la deuxième fois qu’elle remporte le titre après son succès de 2018, exactement au même endroit. La différence de niveau avec ses concurrentes a encore été très sensible et après un nouveau petit break dans l’activité suite aux mondiaux de 2023, personne ne l’attendait vraiment à ce niveau-là. Meryl a encore fait usage de toute la palette de ses acquis : efficacité dans les thermiques à forte densité de pilotes, décisions de recentrage impeccable, choix de groupes gagnants, gestion précise de l’angle de contrôle… Lors de la dernière manche de la compétition (finalement annulée en vol), son propre score à battre était de 965 points pour améliorer son pire résultat (discard). Autant dire qu’elle n’avait pas grand chose à perdre et qu’elle partait carrément pour défier Honorin Hamard, Baptiste Lambert et Julien Wirtz pour la victoire et une place dans l’histoire…
Constance Mettetal a décroché le bronze et continue d’étoffer son palmarès en dépit d’un très léger désavantage matériel. Seule médaillée n’utilisant pas encore la dernière sellette aérodynamique du moment, Constance a combattu sur son propre jeu de la régularité avec une concurrence désormais très disciplinée (Alexia Fischer – USA, Johanna Hamne – Suède, Jenny O’neil – USA). Les concurrentes féminines ont progressé tactiquement et matériellement, ce qui a donné cette opposition acharnée à laquelle nous étions préparés. Malheureusement six manches, c’est presque encore un peu court pour épuiser vraiment tout le monde. Constance, en marathonienne jurassienne bien déterminée, avait gagné au Mexique après dix manches courues dans des conditions complètement dantesques. Cette fois-ci les nombreux temps morts dans la compétition ainsi que la présence de manches marginales ne lui ont pas permis d’exploiter pleinement son point fort.
L’Américaine Alexia Fischer réalise donc l’exploit de s’intercaler entre nos deux Françaises. Soit. Nous la savions très forte après ses récents succès aux USA, au Mexique et en Colombie. Elle fait partie d’une puissante génération de pilotes féminines que nous surveillons depuis quelque temps : Galen Kirkpatrick, Jenny O’neil, Violeta Jimenez. Leur dynamique est intéressante car elle est portée associativement et que ces pilotes utilisent des schémas complémentaires pour renforcer chacune d’entre elles à l’image de ce que nous faisons en France. Galen et Violetta attaquent plus volontiers. Alexia n’est pas la plus expérimentée ni la plus agressive mais elle est là la plus solide défensivement. Nous reparlerons sans doute de ces filles…
Au général
Au classement général, Honorin Hamard confisque à nouveau l’or, avec le panache et l’élégance qu’on lui connaît. Vainqueur de deux manches, la première et la cinquième (la plus longue de la compétition – 94 km) au cours de laquelle il s’échappe seul de la première balise jusqu’à la fin du parcours en ayant régulièrement plus de 1 000 m d’altitude ou bien six kilomètres d’avance sur ses poursuivants. Un véritable monstre d’attaque capable de gagner une journée avec le style le plus insolent pour réaliser un trou parfait dès le lendemain avec exactement la même attitude. Il y a bien longtemps que je ne cherche même plus à comprendre… Honorin obtient le ratio précis qu’il faut entre ses exploits et ses déchets. Série en cours : seizième podium d’affilée en compétition internationale. 49 % de podiums toutes compétitions confondues depuis le début de sa carrière.
Baptiste Lambert remporte la médaille d’argent après avoir connu le bronze au Mexique l’an dernier. Étonnement, il est parvenu à trouver de la régularité alors que son agressivité à l’avant des groupes l’a régulièrement conduit dans des situations objectivement très compliquées. Baptiste a essayé. Il a attaqué et s’est parfois enterré mais il est revenu à chaque fois, et à la fin… il était là, abonné aux premières places. La dernière manche qu’il gagne ex aequo avec Julien Wirtz est fidèle à l’image de toute sa compétition. Il a fait des essais payants et d’autres quasiment fatals mais il a bien maîtrisé l’ensemble des rebondissements !
L’Italien Joachim Oberhauser a utilisé son point fort habituel et ses derniers planés à très haute vitesse pour prendre la troisième place. Son réglage de voile est précis et il fait partie de ces pilotes qui acceptent de sacrifier pas mal de confort et de facilité dans le thermique pour avoir un peu plus de vitesse au moment opportun.
Julien Wirtz termine à la quatrième place du général et signe un retour très serein au plus haut niveau, à quelques détails du podium et en gagnant la dernière manche au passage.
Quinze Français sur les 25 présents dans le top 50. Clément Latour 14e en nette régularisation de ses performances, l’infatigable Stéphane Drouin toujours aussi solide 15e. Quelques contre-performances quand même, notables surtout chez les jeunes qui se sont fait remarquer en volant trop vite sur ce terrain piégeux. Dans l’ensemble, les statistiques sont correctes. Les résultats confirment la bonne forme de l’équipe et lancent la saison avec en ligne de mire le championnat d’Europe fin mai en Andalousie à Pegalajar.
Un dernier mot
Un dernier mot pour remercier l’ensemble des équipes concernées à la fédération, de près ou de loin, par le soutien important et récurrent à ces événements de haut niveau. Dans le désordre : Claude Beaumont au secrétariat pour le volet assurance et commission Médicale, Stéphanie Devcich et Cendrine Ceccarini à la comptabilité, Sophie Maurel aux urgences, Antoine Dupent à la communication, l’équipe des cadres du Haut Niveau : Charles Cazaux, Esteban Bourroufies et le nouveau DTN de la fédération Stéphane Menoux, le médecin fédéral François Duschene de Lamotte et le docteur Mathieu Verschavekeysers pour les nombreuses télé-consultations, sans oublier mon compagnon de voyage, d’aventure et parfois de galère sur cette quinzaine le kiné-ostéo : Léo Blanc.
Merci à l’équipe actuelle des élus de la FFVL pour le soutien au projet de performance fédéral, au premier rang desquels son président : Jean-Louis Coste. Dans cette époque d’incertitude, de contrition budgétaire et de bascule RH, et en dépit de tous les succès et de l’écrasante domination internationale, le haut-niveau reste une priorité institutionnelle exigeante et ne constitue pas une variable d’ajustement fédérale.
Merci enfin à l’initiative de Esteban Bourroufies et des jeunes du pôle Espoirs qui ont permis chaque jour de démocratiser le suivi de l’événement en temps réel à travers leur chaîne Twitch.
Commentaires, présentation des parcours, explications tactiques, scoring, interview au but… Tout y était et les internautes ont été nombreux à suivre la compétition par ce canal :
https://m.twitch.tv/esteban_brf
Résultats complets : https://pwca.events/13th-world-cup-superfinal/#sfresults
Par Julien Garcia, coach de l’équipe de France de parapente